vendredi 25 janvier 2013

C'est beau, une usine, la nuit ?


Ah! La vie de femme d’expat' et ses charmes…

D’abord, il y a la solitude, la plus grande partie de la journée. Mais aussi de « grands moments de solitude ».


Parfois, je me sens seule même quand mon mari est là. Il part à 7h du matin et revient à 8h du soir, avec une envie pressante de regarder les infos et les résultats sportifs du jour sur internet. Enfin, cela lorsqu’il n’est pas en train d’écrire des mails ou de téléphoner pour préparer ses tâches du lendemain. Ces hommes-là sont vraiment surprenants. On dirait que leur entreprise, c’est leur famille. Ils en prennent soin comme de la prunelle de leurs yeux.

L’autre jour, j’ai surpris Jo en train de mettre une photo sur son compte Facebook, avec cette légende directement sortie du cœur : « c’est beau, une usine la nuit… ». Ce à quoi je me suis empressée d’ajouter comme commentaire : « Et toi tu es beau comme un camion. »

Je pensais qu’il n’y avait que lui capable de dire de telles choses, mais hier, alors que je l’attendais à l’usine pour partir à Erbil, Jo m’a présenté un de ses collègues qui arrivait d’Egypte. Nous bavardions, et regardions le gigantesque monstre qui grondait devant nous. Jo a alors dit : « Elle est belle cette usine, hein ? ». J’ai ri intérieurement, en me disant que son collègue allait se moquer de lui. Mais non. L’homme, ému, a simplement ajouté : « Oui, mais c’est aussi tellement beau une usine, la nuit, avec toutes ces lumières… ». J’ai peur…

Pour la solitude, il y a bien sûr la télé. Sauf lorsque votre mari, le roi de la technique, est parti et que vous essayez de l’allumer : la langue du menu s’est mystérieusement transformée en caractères arabes pendant la nuit. Alors vous essayez, intuitivement, d’appuyer sur les touches qui vous semblent logiques. Mais non. Rien n’y fait. La seule chose que j’ai réussie à faire, c’est de changer le menu en langue turque. C’est plus familier, puisque les caractères sont latins, mais je n’y comprends rien non plus. Tant pis pour la télé.

Alors je vais prendre mon petit-déjeuner à l’hôtel. Seule. Heureusement qu’il y a la dame du restaurant, une sympathique philippine très souriante, à qui je peux balbutier quelques mots en anglais. Et là au moins, j’ai gagné la bataille des œufs.

J’aime les œufs à la coque. Mais comment le dire en anglais à une philippine qui n’a pas l’air de connaitre cette recette? Voici un grand mystère, qui m’a valu, à la première demande, des œufs au plat, à la deuxième, des œufs durs, à la troisième des œufs pochés. Je les ai bien sûr mangés, pour récompenser l’effort et la gentillesse. Et hier… Miracle ! Deux magnifiques œufs à la coque ! Je les ai regardés dans les œufs, émue, j’avais envie de les embrasser… Mais je les ai mangés avant qu’ils ne refroidissent.

Mais le plus grand moment de solitude que j’ai vécu s’est produit le jour où nous nous sommes installés dans un des appartements attenant à l’hôtel. Dans la salle de bain légèrement vétuste, je remarque bien qu’il y a un tuyau d’eau à coté des w.c. Mais ce que je ne savais pas, c’est qu’il fallait que nous changions nos habitudes. Résultat : toilettes bouchées le premier jour.

Allez expliquer ça au gentil monsieur kurde de la maintenance, qui était aussi gêné que moi. Finalement, tout s’est bien terminé, et Hassan, le dit-monsieur, m’a donné un cours sur ce que nous devions faire et ne pas faire. Cours entrecoupé par ses « I’m sorry to speak you about that, Madam’ ». Nous sommes devenus, bien contre notre gré, presqu’intimes…

Heureusement, les gens sont d’une rare gentillesse. En particulier la femme de ménage des appartements de l’hôtel, Bouchra, une jolie kurde qui parle anglais encore plus mal que moi, mais avec qui j’arrive à discuter par gestes et par mots, et surtout par regards bienveillants. L’autre jour, lorsqu’elle est arrivée, elle m’a sauté au cou et m’a fait deux grosses bises sur les joues. Comme j’étais un peu interloquée, elle m’a regardée de ses grands yeux noirs brillants et m’a dit : « I love you ! ». Je n’ai pu que lui répondre : « Me too ! ».

Vous voyez, tout n’est pas si noir. Et lorsque je me sens vraiment trop seule, j’ai mon arme secrète : mon joli nouveau Smartphone que mon mari m’a offert en arrivant. Et il parle ! Voyez plutôt (mettez le son) :


A bientôt!

16 commentaires:

  1. il marche tres bien le smartphone... faut juste lui parler gentiment...
    et c'est vrai que c'est beau une usine la nuit...

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    1. Hum... Encore un adepte des usines la nuit? Maladie contagieuse?

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  2. Chère Florence, tu m'as fait bien rire. Je suis tes aventures avec assiduité Bravo pour ton blog!
    Jean-Michel

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  3. Exceptionnel!!!!!!
    Bravo pour ton Blog!

    Denis Carrouge

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  4. ptdrrrr j'en rigole encore de ton monologue car on ne peut pas dire qu'ici se tient un dialogue lol. Je sais ce que tu ressens du fait d'être seule dans un pays où tu ne comprends pas la langue et dont tu ne connais pas un suel lieu mais dis-toi que cela va changer peu à peu laisse moi le temps de régler quelques affaires celles dont je t'ai parlé pour mon travail et après on va se faire des aprèmes entre femmes le temps que Jo revient.
    Courage à toi ma belle bisous
    et j'en ris encore comme une folle de ton smartphone looool "j'espère que vous n'avez rien de cassé", si le moral loooool

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    1. Merci Rundik! Bientôt je vais pourvoir dialoguer avec mon smartphone en kurde... ;-))

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  5. Je lis avec intérêt ton blog depuis le début de ton aventure irakienne. Cette écriture est une très bonne initiative. Une expérience comme celle là, il faut absolument la retranscrire. Chargées d'émotions et de sensations nouvelles, tes journées resteront exceptionnelles à jamais.
    Tu sais donner à tous tes récits non seulement la pointe d'aventure qui les dépeint naturellement, mais en plus, tu les agrémentes du "piment des gestes quotidiens". Tes textes s'en trouvent très enrichis.
    Ce récit autobiographique risque bien de se transformer un jour en un beau roman d'aventure.


    Merci pour ces témoignages. Et encore bravo
    Chantal Paina

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  6. Mille mercis pour ton adorable message Chantal! Ça donne vraiment envie de continuer ce blog avec de tels encouragements...

    C'est vrai que l'expérience est riche. Tout est nouveau pour moi... Le pays, les gens, la langue, mais aussi ma situation (sans enfants et sans job). C'est une rare occasion d'en savoir davantage sur soi, je crois... En tout cas, c'est un beau challenge! Merci de ton soutien!

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  7. Génial le téléphone!!

    bises

    Jean-François Forgeot d'Arc

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  8. Merci Jean-François! Un téléphone qui s'inquiète de ma santé, c'est une merveille de la technologie de pointe...

    Bises à toi et à Marie-Carmen!

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  9. Florence, je viens de lire ton dernier article, super, tu nous divertis vraiment et ça doit te permettre d'attendre ton mari avec plus de sérénité !
    Je ne peux que m'inscrire au rang de ces débiles mentaux. En effet, j'ai vécu des moments inoubliables sur les plates-formes Forties de BP en mer du nord à la fin des 70's.
    Il y en avait quatre et lorsqu'on était sur l'une d'entre elles, on apercevait toujours les 3 autres avec leurs lumières (les derricks forment des mini tours Eiffel et il y en a deux par plate-forme) et leurs torchères (on brûle le gaz inexploité).
    Ce spectacle à la tombée de la nuit (vers 23 heures l'été) sur fond bleu sombre était prodigieux. Figure-toi que j'en rêve encore et que je me réveille encore tout émerveillé par ces images qui me reviennent.
    Dès que Jo fonde le club de ceux qui trouvent belles les usines la nuit, j'envoie mon chèque d'adhésion. J'espère aussi que tu nous posteras une photo de cette usine très prochainement.
    Bon courage à toi et à te lire !

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  10. Merci Jean-Pierre ! Je suis en train de créer l'Association de Ceux qui Aiment les Usines la Nuit (ACAUN). Je te tiens au courant dès que les statuts sont enregistrés pour que tu paies ta cotisation...
    Mille bises!

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  11. Bah tu vas rire, mais moi aussi je garde un souvenir ému de gamin émerveillé devant une centrale électrique à Nantes la nuit, ces milliers de loupiottes, ça me fascinait, je trouvais ça... beau!

    Frédéric

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    1. Si j'avais su qu'en venant ici j'allais découvrir un mouvement de libération pour la contemplation des usines la nuit...
      Je vais peut être faire un blog avec de belles photos d'usines, de centrales nucléaires, de plateformes pétrolières, et autres édifices industriels de charme. Je vais y réfléchir sérieusement...

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